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Vomito Negro

L’épopé de fer et de verre de Pavel Hak

 «Vomito negro», un roman qui, dans la jungle contemporaine, dit la revanche des damnés

 Pavel Hak chante depuis ­plusieurs années l’épopée d’un univers paroxystique où le capitalisme sauvage a atteint un stade ultime de terreur, un monde de prédation intégrale: chacun y poursuit son rêve et se taille à coups de kalachnikov ou de carte de crédit un chemin vers la domination, la richesse et la sécurité. Parfois, les destins des damnés de cette terre-là se croisent et se rejoignent et alors, les prédateurs tombent.

Il y a du fer, du verre, du caoutchouc, du béton, des souterrains, des squats, des tours, des cliniques privées ultra-sécurisées, des banques verrouillées, des bordels, des boîtes de nuit, des docks, des paquebots, des villas, des bunkers, des 4x4, des ordinateurs, des télévisions, des avions et des yachts de milliardaires dans Vomito negro et pourtant, c’est la jungle. Une jungle dans toute sa splendeur métallique, où les flèches sont des balles ou des lance-flammes, où la guerre est permanente et férocement ­asymétrique.

Dans ce monde hérissé de lames, où chaque pas peut être mortel, Pavel Hak met en scène un frère et une sœur, pauvres, nés dans une île caribéenne sans avenir, pourchassés, menacés, armés de leur seul désir de vivre. Ils feront un voyage vengeur vers l’Occident et ses richesses. Leur père, en toile de fond, se souvient du trajet inverse, celui des esclaves. Traversant les époques, il raconte comme sienne l’histoire de la traite des Noirs: la capture, le transport, les révoltes réprimées, l’esclavage.

Pavel Hak orchestre la vengeance des damnés de la terre au rythme infernal et beau de ses mots: hachés, précis, contemporains, et qui souvent quittent le récit pour puiser leur force vive dans le poème.

par Eléonore Sulser